La campagne fait tapisserie
La chronique de Claude BaudryMARS 2017
Comme tous les quinze jours, France Inter délocalise son antenne pour aller tâter le pouls de l’opinion et si possible parler enfin du fond dans cette campagne présidentielle. Hier, la radio était à Aubusson, dans un département, la Creuse, devenu le symbole de la disparition des services publics en milieu rural. Cela permettait un peu d’aborder l’une des questions essentielles de la présidentielle. Et Aubusson était bien choisi tant le débat fait un peu tapisserie dans cette campagne dominée outrageusement sur nos écrans et sur nos antennes par l’affaire Fillon.
Le candidat LR, qui a vu 200 000 personnes sur la place du Trocadéro qui peut en contenir 50 000 – les chiffres, ce n’est pas son truc : il n’avait pas réussi non plus à compter les manifestants qui s’opposaient à sa loi sur la Sécurité sociale en 2003 – était l’invité de Laurent Delahousse dimanche soir pour une longue séquence dans le 20 heures de France 2. Encore une fois, son affaire éclipsait le reste de l’actualité comme chaque jour de ce feuilleton à rebondissements. Il faut bien reconnaître que les meilleurs scénaristes de série doivent prendre des leçons en cette période.
Qui aurait pu penser ainsi que, au détour d’une phrase, un Fillon en apparence imperturbable nous dise, sans sourciller, que la télévision avait annoncé le 1er mars « le suicide de sa femme » ? Le jour où il n’avait pu se rendre au Salon de l’agriculture à l’heure initialement prévue.
Cette étrange campagne ne sent pas bon
BFMTV, qui devait comme toujours meubler ses antennes pour commenter le vide, avait certes évoqué la possibilité d’un événement grave. De là à entendre un suicide… On fut donc rassuré de voir la fameuse Penelope sous un coin de parapluie, pas vraiment pourtant un coin de paradis… auprès de son saint François. Passons.
Entre la Le Pen, elle aussi poursuivie par les juges mais qui s’en fout, et Fillon, cette étrange campagne ne sent décidément pas bon. Et Macron ? Alors qu’il était complaisamment interrogé l’autre soir par David Pujadas sur son « programme », on se souvenait de sa fameuse loi lorsqu’il était le ministre de François Hollande. Et en particulier cet amendement sur le secret des a# aires qui visait à empêcher les journalistes de faire leur boulot sous peine de sanctions.
L’ensemble des journalistes s’était élevé jusqu’à obtenir de Macron qu’il retire ledit amendement. C’est peut-être pour ça que la presse le chouchoute. A propos, depuis le 1er février, le temps de parole doit être « équitable » pour les candidats à la présidentielle. Juste un rappel. La tapisserie, c’est comme au bal, ça va un temps.
Claude Baudry